16 avril 1917. 6h du matin. Sous le commandement du général Mangin, les tirailleurs sénégalais s’élancent à l’assaut des pentes du Chemin des Dames. C’est le début de l’offensive Nivelle qui doit être rapide et décisive. Mangin tient enfin l’occasion de faire la preuve de sa théorie sur la "Force noire" et son "incomparable puissance de choc" détaillée dans un ouvrage paru en 1910.
Des milliers de combattants des territoires d’Afrique occidentale, préparés à la hâte sous le soleil du Sud de la France, se retrouvent à mener bataille dans le froid, sous la pluie, la neige, transpercés par un vent glacial. Ils avancent péniblement sur un terrain escarpé et boueux, essuyant les tirs nourris des mitrailleuses allemandes à peine affaiblies par l’artillerie française. C’est une boucherie. Un massacre. Sur les 15 000 tirailleurs sénégalais engagés ce 16 avril, 6 000 meurent lors de l’assaut suicidaire. Le général Nivelle (conseillé par les généraux Mangin, Mazel et Micheler) avait choisi d’envoyer en première ligne ces hommes venus d’Afrique, peu formés aux manœuvres militaires et comprenant à peine un français qu’ils ne balbutiaient pas mieux, au motif qu’il ne fallait pas "ménager le sang noir pour conserver un peu de blanc".
Durant les quatre années que dura le conflit, 164 000 tirailleurs participèrent aux combats. Ils venaient du Sénégal, de Côte d’Ivoire, du Bénin, de Guinée, du Mali, du Burkina Faso, du Niger, de Mauritanie. Ils ont souffert, donné leur sang mais les promesses faites pour les motiver n’ont jamais été tenues. Le général Mangin rendra tout de même hommage à ces hommes en 1924 : "L’Afrique occidentale nous a fourni 164 000 hommes qui ont montré la vaillance de leur race et leur amour du drapeau français. Jamais nous ne devons oublier le sang qu’ils ont généreusement versé avec le nôtre."